Histoire de Tréglonou

Position géographique

Située à une altitude de 35m sur les rives de l’Aber-Benoît, appelé Aber Benniget au XVe siècle (d’après les archives de l’Abbaye de Landévennec), Tréglonou est traversée par trois routes départementales en direction de Lannilis, Plouguin, Plouvien et Coat-Méal. Leur fréquentation donne une certaine animation tout au long de l’année, et plus particulièrement en période estivale.

Le pont de Tréglonou

On accède à Tréglonou en venant de Lannilis par la D 28.
Pour passer d’une rive de l’Aber à l’autre, il fallait passer par le gué gaulois puis par le bac de Beg an Truc jusqu’en 1851, année où fut construit un pont en bois de plus de 50m en prolongement de digues en terre s’amorçant sur chaque rive. Un péage a été mis en place jusqu’en 1893, année du rachat de la concession par le Département. Ce pont étant devenu insuffisant, à la demande des communes de Tréglonou et Lannilis, le Conseil Général entreprit la construction d’un nouveau pont.

Ce pont en béton armé de 4 travées de 12.50m, d’une longueur de 70.70m, a été construit par la société du Limousin. Il appartient au Département du Finistère et a été inauguré en grandes pompes en 1935. Ce pont passe au-dessus de l’Abert-Benoît, à l’endroit qui était, dans des temps très lointains, considéré comme un havre et s’appelait Port de Benouhic. Ce Bénouhic était un chef breton du Bas-Léon, père du fameux Lancelot du Lac, si célèbre dans les chroniques des « chevaliers de la table ronde ».
Situé dans le port de Tréglonou, à proximité du site ornithologique de l’Aber-Benoît et de l’accès au sentier côtier qui mène le randonneur jusqu’à l’anse de Locmajan, le pont représente un site privilégié pour les pêcheurs à la ligne. Le promeneur ou l’automobiliste qui passe sur le pont a une vue magnifique de l’Aber lorsqu’il se dirige vers Lannilis et, lorsqu’il en revient, il s’émerveille de la vue apaisante du bourg de Tréglonou, niché sur les rives de l’Aber-Benoît, surtout le soir, quand le village est éclairé. Un site remarquable à voir absolument.

Un peu d’histoire

La découverte en 1985 à Kerellen d’un souterrain et de chambres datant de l’âge du fer apporte la certitude que Tréglonou et la région étaient habitées bien avant notre ère, au temps de la grande migration celtique dite civilisation de HALLSTATT et de la TENE, entre le Ve et le IIIe siècle avant J.C.

Nom d’origine

Attesté sous la forme de Treffgloeznou en 1465, de Tregoeznou en 1516, le Treffgloznou du xviie siècle7 est aujourd’hui orthographié en breton Treglonoù.

Ancienne trève de Plouguin, l’existence de Tréglonou se révèle dès le Ve siècle par le passage sur ses terres de Pol Aurélien, venu du Pays de Galles et accompagné de ses compatriotes (il subsiste, à Keryel, les ruines d’une chapelle privée dédiée à Kiel, compagnon de Pol Aurélien). L’église paroissiale, reconstruite au XIXe siècle, lui est dédiée ; elle conserve quelques parties de l’ancien édifice, notamment la porte latérale avec les écussons des seigneurs de Trouzilit, Kergorlay, Kerouartz et Keryel. Au XVe siècle, Tréglonou dépendait de la vicomté de Coat-Méal qui faisait partie du siège royal du Duc de Rohan.

« Des origines du nom de Tréglonou »

Traditionnellement, le toponyme de Tréglonou est présenté comme étant composé du préfixe « TRE » et du suffixe « GLONOU ».
GLONOU reste mystérieux. Certains y voient une dérivation de « CLONES », vieux gaulois signifiant « collines », ayant donné CLUNY et donc le nom de la célèbre Abbaye. D’autres l’imagine dédié à un supposé Saint Clotnou, inconnu par ailleurs, dans le nom duquel se reconnaissent les mots celtiques « clot » (gloire) et « gnou » qui signifie connu, notoire, avec une idée d’apparition, de révélation.

Il sera noté l’intéressante similitude géographique entre « tre »-« glonou » sur l’Aber-Benoît et « ker »-« glonou » sur l’Aber-Ildut, les deux lieux étant pourvus d’une cale d’accostage de sabliers et autres bateaux de charge (depuis l’époque médiévale jusqu’à nos jours).

Mais que signifie le « TRE » de glonou ?

Une version « officielle » et non contestée à ce jour présente de façon indubitable ce « TRE » comme constituant de tout évidence une « TRE(F) » en vieux français, ou une « trêve » en français moderne, soit une circonscription territoriale d’origine monastique, ou en tout cas ecclésiastique.

Et il est vrai que la Bretagne est constituée d’une multitude de « TRE » et de « PLOU » qui sont autant de subdivisions de l’organisation territoriale importée d’Irlande et du Pays de Galles au cours de l’invasion celte du Ve siècle après Jésus-Christ, qui a « re-bretonisé » la péninsule Armorique après cinq siècles d’occupation romaine.

La publication en 1998 d’un fac similé du « cartulaire de Redon », et l’important travail de recherche effectué à cette occasion par les promoteurs de cet excellent travail amènent à reconsidérer la question :
Dans le chapitre « les noms d’hommes et les noms de lieux » de la présentation du manuscrit faite par Bernard Tanguy, nous relevons, au sous-chapitre « ponts, passages, gués et pêcheries » :
« quelques toponymes dénoncent des gués, comme « Vadum Bhian », le petit gué, à St Marcel, et, formé avec le vieux breton RIT « gué, BALRIT, aujourd’hui Beaureu en Bains, ou des passages, en vieux breton TRETH, comme KAER en TRETH, aujourd’hui Kerentré en Sainte Hélène, TRETHILKEL, aujourd’hui Tréhiguier en Penestin (embouchure de la Vilaine), TRETGRUUC, lieu en resac, aujourd’hui Saint-Perreux, TRESLERIEN, port en aversac, le mot TREZ est lui-même employé comme nom dans un acte concernant le passage de Tréhiguier, acte où sont évoquées « certaines grandes pierres placées au milieu du mont, près du sentier conduisant au passage ».

La similitude des situations géographiques de Tréhiguier, à l’entrée de la Vilaine, de Tréguier, paroisse de Saint-Yves, à l’entrée du Jaudy, laisse déjà penser que Tréguier, siège épiscopal de Tugdual et donc non susceptible à ce titre d’être une simple « trêve » dépendant d’un quelconque monastère, est également un lieu habité depuis fort longtemps de par sa position de « passage » ou de « gué » sur cette rivière bien avant la création du Tréguier « moderne » et de son célèbre « Minihy ».

Tréguier et Tréhiguier ne seraient ainsi que deux variantes, l’une « nordique » et l’autre « sudiste » des dérivés du vieux breton du mot « TRETH », devenu « TREZ » (comme dans Plounéour-Trez), et signifiant indifféremment gué, passage, banc de sable, baie ensablées… Tous lieux où l’homme peut franchir un bras de mer à pied ou au prix d’une petite navigation sans risque pour lui et son bétail, ses biens ou sa famille.
Dans ce contexte, la géographie particulière de Tréglonou et la découverte de son oppidum dans les années 1980 datant de 380 avant J.C., lequel protégeait probablement un antique port de transit entre la Méditerranée et les pays nordiques via les Iles Scilly et faisait sans doute partie d’un impressionnant ensemble militaire comportant la mythique « TOLENTE » (traditionnellement située dans les parages de l’Ile Vierge), mais aussi l’oublié « CASTEL-ORRAUP » de Plouguin au-dessus de la pêcherie et du port d’échouage de LOC-MAJAN amène à se poser la question du bien fondé (et pourtant bien établi) postulat selon lequel le « TRE » de « GLONOU » constituait une « trêve » (de quel monastère d’ailleurs, même s’il est voisin du « LAN » de ILIZ ?).

Et si le « TRE » de GLONOU ne signifiait pas « trêve » mais « Treth », c’est-à-dire « passage » ?

N’y a-t-il pas là un pont entre le PLOU de « Guitalmeze » et le LAN de « ILIZ », et avant ce pont, n’y avit-il pas là un « treiz », avec un passeur appointé ? N’y a-t-il pas juste à côté un « treiz-coz », soit un point de départ du passeur abandonné ultérieurement pour un point d’embarquement plus propice à une traversée plus rapide, donc plus rentable ?
L’affaire se dévoile peu à peu : Tréglonou serait le « passage » de GLONOU et non la « trêve » de GLONOU.

Mais, au fait, que signifie la « trêve » en français ?

Selon le dictionnaire historique de la langue française de Alain Rey, trêve, d’abord trive (vers 1136), puis trieve (XIIe S.) et treve (vers 1210) est issu du francique TREUWA, proprement « sécurité », auquel se rattachent l’allemand « treve », fidélité, TREU, « fidèle », et l’anglais TRUE, « vrai ».
Cette notion de « sécurité » explique l’acception du mot « treve » dans les expressions « faire trêve de », ‘n’avoir ni paix ni trêve », « trêve de Dieu », « trêve des confiseurs », etc.

Ainsi donc, le mot « TRETH », au sens de gué ou de passage, point de sécurité pour passer d’un lieu à un autre, et celui de « TREVE », moment de sécurité entre deux périls guerriers, donc aussi endroit (monastique de sécurité entre deux zones de danger militaire) pourraient-ils provenir de la même origine, à savoir la notion de paix, de sécurité, d’absence de danger.
Si cela était, quel beau nom que celui de TRE-GLONOU !

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